Le malade imaginaire – Guérir un autre homme

Dans Le Malade imaginaire, Molière met en scène Argan et Beralde. Argan s’étonne de ce que Beralde n’ait plus foi en la médecine. Beralde pense en effet que la médecine est une activité ridicule, voire même de la folie.

Voici un extrait :

ARGAN Mais raisonnons un peu, mon frère. Vous ne croyez donc point à la médecine ?

BERALDE Non, mon frère, et je ne vois pas que, pour son salut, il soit nécessaire d’y croire.

ARGAN Quoi ! vous ne tenez pas véritable une chose établie par tout le monde et que tous les siècles ont révérée ?

BERALDE Bien loin de la tenir véritable, je la trouve, entre nous, une des plus grandes folies qui soient parmi les hommes ; et, à regarder les choses en philosophe, je ne vois point une plus plaisante mômerie, je ne vois rien de plus ridicule, qu’un homme qui se veut mêler d’en guérir un autre.

ARGAN Pourquoi ne voulez-vous pas, mon frère, qu’un homme en puisse guérir un autre ?

BERALDE Par la raison, mon frère, que les ressorts de notre machine sont des mystères, jusques ici, où les hommes ne voient goutte; et que la nature nous a mis au-devant des yeux des voiles trop épais pour y connaître quelque chose.

ARGAN Les médecins ne savent donc rien, à votre compte ?

BERALDE Si fait, mon frère. Ils savent la plupart de fort belles humanités, savent parler en beau latin, savent nommer en grec toutes les maladies, les définir et les diviser; mais, pour ce qui est de les guérir, c’est ce qu’ils ne savent pas du tout.

ARGAN Mais toujours faut-il demeurer d’accord que, sur cette matière, les médecins en savent plus que les autres.

BERALDE Ils savent, mon frère, ce que je vous ai dit, qui ne guérit pas de grand’chose: et toute l’excellence de leur art consiste en un pompeux galimatias, en un spécieux babil, qui vous donne des mots pour des raisons, et des promesses pour des effets.

Acte III Scène 3, Le Malade imaginaire

Culturé générale : la Santé

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